QUESTION 1/8 Comment faire
comprendre que le mariage chrétien constitue une expérience de
plénitude, et non pas une limite ? Quelles sont les initiatives
pastorales qui vous semblent intéressantes en ce sens ?
TEXTE DE REFERENCE : N° 36 – Du
point de vue religieux, le mariage est une vocation Le mariage
chrétien est une vocation qui s’accueille par une préparation
adéquate au long d’un itinéraire de foi, avec un discernement
mûr, et qui ne doit pas seulement être considéré comme une
tradition culturelle ou une exigence sociale ou juridique.
R/ Pour faire comprendre que le mariage
est une vocation, il faut admettre l'égale dignité entre les
différentes vocations auxquelles peuvent être appelés les
baptisés. Donc ne pas faire de hiérarchie explicite ou implicite
entre vocations religieuses et/ou presbytérales, et vocations au
mariage. Cela ne relève en aucun cas d'une quelconque faiblesse
spirituelle que de se marier.
Au niveau théologique, il y aurait à
creuser plus encore les images bibliques des épousailles entre Dieu
et son peuple, entre Dieu et l'Humanité. Les époux pourraient être
envisagés comme configurés à Dieu dans leur engagement mutuel. Il
n'y aurait pas à configurer plus particulièrement l'époux masculin
à la figure divine, puisque dans les images des épousailles, Dieu
prend souvent des attributs féminins (utérus qui se contracte,
etc.). Ces images des épousailles divines vis-à-vis de l'Humanité
seraient par ailleurs un soutien spirituel pour les couples, pour
apprendre la patience, la miséricorde, le pardon...
Au niveau de l'engagement
caritatif/social de l’Église, la prise au sérieux de ce que le
mariage est pleinement sacrement, c'est à dire signe de l'amour de
Dieu, devrait pousser nombre de chrétien à s'opposer aux formes
sociales qui nient le plus radicalement l'amour gratuit et réciproque
du Cantique des cantiques. Il s'agirait donc de s'opposer à toutes
formes de prostitution, à l'instar de la vie prophétique d'Osée.
Comme Saint-Ignace, en la Maison Sainte-Marthe à Rome, accueillir
les personnes prostituées pour leur donner la liberté de sortir de
la prostitution. Comme Saint-Augustin au sermon de Bulla Regia,
exiger des clients de la prostitution à cesser de l'être.
Au niveau de la préparation au
mariage, il s'agirait en toute logique de présenter et concevoir la
préparation au mariage comme un parcours de foi. Avec plusieurs
difficultés :
- que l’Église ne se mette pas en position d'apprendre unilatéralement aux fiancés ce qu'est la foi. S'il on prend au sérieux le fait que l'amour entre deux humains est signe d'amour de Dieu, il faut admettre que dans l'amour que ressentent ces êtres, Dieu précède l’Église et son discours. Il y a du Cantique de cantiques en chaque couple d'amoureux. Il y aurait donc une dimension importante de relecture de vie. L’Église aurait donc à prendre plus conscience qu'elle peut être évangélisée par le témoignage des couples mariés. Il y aurait à inventer des moyens (rites ? Rencontres ? ) pour laisser manifester ce qu'expérimentent de la foi et de l'amour les couples engagés dans cette vocation particulière.
- Que l'articulation entre foi ecclésiale et amour dans le couple ne se fasse pas que sous forme intellectuelle, afin de ne pas mettre de côté celles et ceux pour qui cette manière de communiquer leur expérience intime n'est pas la plus spontanée. Inventer, ou renouveler donc des manières de manifester comment l'amour humain est à l'image de l'amour divin, par des célébrations, des chants, des chorégraphies, etc.
- ne pas avoir une vision magique et ponctuelle du sacrement. Le sacrement du mariage, si on prend au sérieux tous ce qu'implique ce que l'on signifie par là, dure autant de temps que s'aiment les époux, par les différents moyens par lesquels ils manifestent l'un à l'autre leur amour. Peut être y aurait-il des parallèles à faire entre le sacrement de communion, qui se renouvelle à chaque eucharistie, et le sacrement du mariage. Réfléchir aussi au lien entre la parentalité et le sacrement du mariage. Quel renouvellement de ce qui a été vécu le jour de la cérémonie du sacrement, que de vivre dans sa chair la fécondité ! Quel autre aspect de l'amour divin s'incarne quand on accueille sans condition un être dont on ne sait rien, et qu'on aime sans preuve de ce qu'il sera...
En conclusion à cette question, il y
aurait à revisiter le sens du mot « fidélité ». Le
débarrasser de sa sclérose autour de l'idée d'un engagement
névrosé à n'avoir de relation sexuelle qu'avec une seule personne,
pour retrouver son lien étymologique avec la Foi, donc un engagement
à se fier à un(e) autre.
QUESTION 2/8 Quelles difficultés
percevez-vous dans les familles proches de vous ? L’Eglise
accueille-t-elle ces difficultés et de quelle manière ? Comment
l’attention particulière de la part de l’Eglise envers les
familles monoparentales peut-elle être perçue ?
TEXTE DE REFERENCE : N° 6 –
Facteurs de pauvreté Il existe … une sensation générale
d’impuissance vis-à-vis de la situation socio-économique qui
finit souvent pas écraser les familles. Il en est ainsi à cause de
la pauvreté et de la précarité de l’emploi qui ne cessent
d’augmenter et qui sont parfois vécues comme un véritable
cauchemar, ou bien à cause d’une lourde fiscalité qui n’encourage
certes pas les jeunes à se marier. Souvent les familles se sentent
abandonnées à cause du désintéressement et de la faible attention
que leur accordent les institutions.
R/ Il y aurait beaucoup de chose à
distinguer. D'abord quand on parle « d’Église ». Il y
a l’Église perçue par « les gens ». Chacun pouvant
avoir un vécu différent : Église telle que représentée par
les média ; Église-hiérarchie ; Église communauté
locale de chrétiens... Les communautés chrétiennes sont en général
accueillantes, compréhensives et compatissantes pour le vécu
particulier de celles et ceux qui sont proches. La hiérarchie
cléricale est traversée par des contradictions fortes, entre
accueil et intransigeance imbécile, avec toutes les nuances
intermédiaires. Le discours ecclésial relayé par les média donne
une image d'intransigeance, favorise l'idée que la pratique
catholique s'articule autour d'une exigence de conformité à un
idéal sexuel unique (ou double s'il on y ajoute l'alternative du
célibat consacré). Or, s'il s'agit de préserver l'apparence d'une
telle exigence, seule certaines catégories sociales en ont à la
fois le loisir, et l'intérêt matériel. Il en découle que
l'adhésion à ce discours se rencontre essentiellement dans ces
milieux (avec toutes les hypocrisies qui ont tant alimenté la
littérature). En effet, le lien est rarement fait parmi les
chrétiens entre les difficultés économiques au quotidien, en
particulier la précarité, et la difficulté de rester stable pour
un couple (pourtant de toutes les cartes démographiques publiées
par E. Todd et H. Le Bras, dans le « mystère français »,
la plus forte corrélation spatiale se trouve entre la carte du
chômage et la carte des familles monoparentales). On assiste alors à
une disjonction des engagements, où les uns s'engagent « pour
les familles », et les autres s'engagent « pour les
pauvres ». Ces deux dernières années, on a assisté en France
a un véritable paroxysme dans cette schizophrénie ecclésiale entre
« chrétiens de gauche » et « chrétiens de
droite ».
Il y aurait peut être un renversement
des valorisations familiales à opérer. Relativiser l'exemplarité
des couples stables, qui le sont souvent plus pour des raisons de
patrimoine ou de représentation sociale que par sincère amour et
fidélité. Et reconnaître les combats spirituels sincères et
valeureux que mènent celles et ceux qui sont dans des situations de
vie difficiles, et qui pourtant aiment et croient en l'amour, « même
mal ». Ces derniers sont souvent dans la situation paradoxale
de manifester une foi ferme, malgré les épreuves, mais d'être
considérés, et souvent de se considérer eux-mêmes, comme des gens
de mauvaise vie, sans grandeur...
Une tentation guette la société toute
entière, qui n'est perçue dans sa cohérence ni par les « chrétiens
de gauche », qui luttent contre l'idolâtrie de l'argent-roi,
ni par les « chrétiens de droite », qui luttent contre
l'idolâtrie du sexe-roi. C'est la tentation de la prostitution
généralisée, qui aimerait réduire chaque être humain à un
individu-marchandise-consommateur. Il s'agirait de lutter de manière
cohérente, à la fois contre le cynisme qui réduit chacun à son
rôle économique, et contre le cynisme qui nie et discrédite la
possibilité d'un amour gratuit et altruiste dans un couple, et qui
fait l'apologie du prédateur sexuel prétendu « libertin ».
QUESTION 3/8 L’Eglise
manifeste-t-elle de l’estime envers les différentes formes de
relation en dehors du mariage chrétien ? Pour ceux qui vivent des
formes de relations autres que le mariage, comment l’Eglise
peut-elle révéler cette « divine pédagogie » (n°25) et
reconnaître que la grâce de Dieu opère aussi dans leur vie.
TEXTE DE REFERENCE : N° 22 – Le
mariage comme le bien suprême de toutes cultures et religions ;
respect des dif-férentes forces culturelles Le Concile Vatican II a
voulu exprimer son appréciation du mariage naturel et des éléments
valables présents dans les autres religions (cf. Nostra Aetate, 2)
et dans les cultures, malgré les limites et les insuffisances (cf.
Redemptoris Missio, 55). La présence des semina Verbi dans les
cultures (cf. Ad Gentes, 11) pourrait aussi être appli-quée, par
certains aspects, à la réalité du mariage et de la famille de
nombreuses cultures et de personnes non chrétiennes. Il existe, par
ailleurs, des éléments valides aussi dans certaines formes se
situant hors du mariage chrétien – mais toujours fondé sur la
relation stable et vraie entre un homme et une femme -, que nous
considérons, quoi qu’il en soit, comme étant orien-tées vers
lui. Le regard tourné vers la sagesse humaine des peuples et des
cultures, l’Église reconnaît aussi cette famille comme la cellule
de base nécessaire et féconde à la coexistence humaine. N° 25.
Dans l’optique d’une approche pastorale envers les personnes qui
ont contracté un mariage civil, qui sont divorcées et remariées,
ou qui vivent simplement en concubinage, il revient à l’Église de
leur révéler la divine pédagogie de la grâce dans leurs vie et de
leur aider à parvenir à la plénitude du plan de Dieu sur eux. En
suivant le regard du Christ, dont la lumière éclaire tout homme
(cf. Jn 1, 9 ; Gaudium et Spes, 22), l’Église se tourne avec amour
vers ceux qui participent à sa vie de manière incomplète, tout en
reconnaissant que la grâce de Dieu agit aussi dans leurs vies (…).
En méditant la guérison du serviteur
du centurion, on pourrait envisager une conversion encore plus
radicale. Il ne s'agit pas de juger quelle est la proximité des uns
ou des autres vis-à-vis de l'idéal que Dieu a prévu pour eux. Il
s'agit plutôt de se laisser émerveiller par ce que Dieu manifeste
déjà dans ce que vivent les uns ou les autres. « Jamais en
Israël, je n'ai vu une telle Foi », a déclaré Jésus à
propos du centurion. Pourtant, quelle pouvait être au juste la forme
d'amour qu'éprouvait ce centurion pour son esclave, dans le contexte
de la romanité de la partie hellénisée de l'Empire ?
Si l’Église a l'intention de révéler
une « divine pédagogie », elle doit se mettre humblement
à son école. L'enjeu dans les relations humaines comme le mariage,
mais comme le célibat consacré, ce n'est pas la forme des
relations, c'est le chemin de Foi que ces formes autorisent. Comment
apprend-on à mieux se fier à Dieu et à son prochain dans ces voies
respectives ? Comment apprend-on à mieux aimer ? Comment
se rend-on disponible à la miséricorde de Dieu comme à celle de
ses proches ? Comment apprend-on soi-même à être
miséricordieux ? Comment apprend-on, en somme, à vivre dans la
Foi ? Il y a hors du mariage et hors de l’Église nombre de
nos proches qui vivent la Foi par certains côtés mieux que nous. Le
dire et le reconnaître ne relativise en rien le mariage et sa
dimension sacramentelle. Pas plus que reconnaître la dimension
sacramentelle de l'ordre dans le célibat ne diminue celle du
mariage. Rentrer dans cette logique supposerait de rentrer dans une
pratique forte de la lecture « des signes des temps ». Il
ne s'agirait pas pour autant d'être sans exigence, « béni-oui-oui ».
Si une Foi authentique peut se manifester hors des cadres reconnus
par la Tradition, les dangers du péché y sont aussi présents. Mais
ces dangers sont autant présents à l'intérieur des cadres reconnus
par la Tradition, d'autant plus quand des formes de pharisaïsme
s'attachent à la forme plutôt qu'à l'esprit.
QUESTION 4/8 Que pensez-vous de la
proposition de concevoir la préparation au mariage comme un chemin
de foi – en lien avec les autres sacrements? Comment est-ce
conciliable avec le fait que la plupart des couples reprennent
contact avec l’Eglise après une longue période de désintérêts,
lorsqu’ils souhaitent un mariage religieux ?
TEXTE DE REFERENCE : N° 39 –
Nouveaux efforts pour faire comprendre le mariage chrétien La
situation sociale complexe et les défis auxquels la famille est
appelée à faire face exigent de toute la communauté chrétienne
davantage d’efforts pour s’engager dans la préparation au
mariage des futurs époux. … Un enracinement de la préparation au
mariage dans l’itinéraire de l’initiation chrétienne, en
soulignant le lien du mariage avec le baptême et les autres
sacrements. De même, la nécessité de programmes spécifiques a été
mise en évidence pour la préparation proche du mariage, afin qu’ils
constituent une véritable expérience de participation à la vie
ecclésiale et approfondissent les différents aspects de la vie
familiale.
R/ C'est une excellente idée. Non
seulement en continuité avec les sacrements de l'initiation, mais
aussi en articulation avec le sacrement de l'ordre. Dans quelle
mesure cela aiderait à résoudre la crise théologique qui traverse
aussi la définition du sacrement de l'ordre ? Une réflexion
plus poussée serait nécessaire.
Une certaine fermeté impopulaire me
semble néanmoins nécessaire en toute logique : refuser le
sacrement du mariage à des couples souhaitant le « mariage à
l'église » pour des raisons folkloriques ou superstitieuses.
Il ne s'agit pas pour autant de les éconduire. Des bénédictions
peuvent être proposées. Une manière d'expliquer ce que représente
pour les chrétiens le sacrement du mariage permet peut être de
faire prendre conscience à certains que ce n'est pas ce qu'ils
veulent à un moment donné, et qu'ils ont peut être besoin de temps
pour se sentir prêt à cette dimension-là. Par ailleurs, et peut
être en contradiction avec ce qui précède, le parallèle avec la
pratique du baptême des nourrisson peut être fait. Le
sacrement a une efficacité intrinsèque. Beaucoup de baptisés se
rendent compte longtemps après le baptême de l'énormité de ce
qu'ils ont vécu, et ressentent le besoin de manifester un renouveau
de leur baptême. On pourrait également imaginer de proposer à des
couples anciennement marié de redécouvrir et de manifester un
renouveau de leur mariage.
Pour continuer les analogies entre
sacrements du mariage et sacrements de l'initiation, on peut noter
que, chez les romains, on a distribué sur des âges
anthropologiquement marquant la célébration du triptyque baptême –
communion – confirmation. On pourrait imaginer déployer le
sacrement du mariage sur des âges structurants dans la vie d'un
couple (fiançailles, mariage, accueil de l'enfant, « maturité »,
devenir grand-parent ...). L'articulation avec le sacrement de
l'ordre pourrait être renforcé dans ce mouvement en liant un de ces
temps (maturité?) avec le diaconat, ou un autre ministère...
QUESTION 5/8 Une simplification de
la procédure de déclaration en nullité du mariage pourrait-elle
être envisagée comme une voie de soutien ? En quoi ? Comment
estimez-vous l’impact d’une déclaration en nullité d’un
mariage de longue durée dont sont nés des enfants sur les personnes
directement concernées et leur entourage ?
TEXTE DE REFERENCE : N° 48 –
Simplification de la procédure en nullité Un grand nombre de Pères
a souligné la nécessité de rendre plus accessibles et souples, et
si possible entièrement gratuites, les procédures en vue de la
reconnaissance des cas de nullité. Parmi les propositions, ont été
indiqués : l’abolition de la nécessité de la double sentence
conforme ; l’ouverture d’une voie administrative sous la
responsabilité de l’évêque diocésain ; le recours à un procès
simplifié en cas de nullité notoire. Certains Pères se disent
toutefois contraires à ces propositions, car elles ne garantiraient
pas un jugement fiable. Il faut réaffirmer que, dans tous ces cas,
il s’agit de vérifier la vérité sur la validité du lien. Selon
d’autres propositions, il faudrait aussi considérer la possibilité
de mettre en relief, en fonction de la validité du sacrement du
mariage, le rôle de la foi des deux personnes qui avaient demandé
le mariage, en tenant compte du fait qu’entre baptisés tous les
mariages valides sont sacrement.
Résoudre la question des
divorcés-remariés par le recours exclusif à la nullité des
mariages concernés me semble une facilité dangereuse. Je me base
essentiellement sur le témoignage d'une femme victime de violence ne
souhaitant pour autant pas s'entendre dire que ce qu'elle a vécu
avec cet homme était « nul ».
Jésus a interdit la répudiation
unilatérale du mari par la femme. Il le justifie par Gn2, « l'homme
et la femme ne font plus qu'une seule chair ». Pour autant, les
expériences de séparation ressemble souvent à des expériences de
mort. De ce point de vue, exiger des deux partenaires de s'interdire
tout nouvel amour de couple, quand les événements qu'ils ont pu
vivre avec l'autre peuvent être de l'ordre d'une mort, c'est me
semble-t-il condamner cette femme ou cet homme à rester dans un
tombeau relationnel. Contradiction énorme quand on prêche la foi en
la résurrection.
Envisager un tel cheminement suppose
évidemment un engagement de la communauté chrétienne à
accompagner celles et ceux qui ont été jadis admis à célébrer le
sacrement du mariage. Accompagnement dans le discernement, mais avec
des solutions spirituelles pour renaître.
Le coût que peut représenter la
procédure de nullité peut constituer en soi une cause de scandale.
D'autant plus s'il s'agit de la seule possibilité pour envisager de
se séparer de son conjoint tout en étant reconnu par l’Église.
QUESTION 6/8 Quel accueil l’Eglise
réserve-t-elle aux divorcés remariés ? Que pensez-vous de la
proposition d’admettre les divorcés remariés à l’Eucharistie
après un temps de pénitence ? Que pensez-vous de la proposition
d’inciter les divorcés remariés à emprunter le chemin de la
communion spirituelle ?
TEXTE DE REFERENCE : N° 52 et 53 –
Divorcés remariés et sacrements La réflexion a porté sur la
possibilité pour les divorcés remariés d’accéder aux sacrements
de la Pénitence et de l’Eucharistie. Plusieurs Pères synodaux ont
insisté pour maintenir la discipline actuelle, en vertu du rapport
constitutif entre la participation à l’Eucharistie et la communion
avec l’Église et son enseignement sur le mariage indissoluble.
D’autres se sont exprimés en faveur d’un accueil non généralisé
au banquet eucharistique, dans certaines situations particulières et
à conditions bien précises, surtout quand il s’agit de cas
irréversibles et liés à des obligations morales envers les enfants
qui viendraient à subir des souffrances injustes. L’accès
éventuel aux sacrements devrait être précédé d’un cheminement
pénitentiel sous la responsabilité de l’évêque diocésain. La
question doit encore être approfondie, en ayant bien présente la
distinction entre la situation objective de péché et les
circonstances atténuantes, étant donné que « L’imputabilité et
la responsabilité d’une action peuvent être diminuées voire
supprimées » par divers « facteurs psychiques ou sociaux »
(Catéchisme de l’Église Ca-tholique, 1735). Certains Pères ont
soutenu que les personnes divorcées et remariées ou vivant en
concubi-nage peuvent recourir de manière fructueuse à la communion
spirituelle. D’autres Pères se sont demandés pourquoi, alors,
elles ne pouvaient accéder à la communion sacramentelle.
Favorable à l'accueil des
divorcés-remariés à la table eucharistique. S'ils n'en sont pas
dignes, qui dans la communauté le seraient ?
QUESTION 7/8 Les personnes
homosexuelles ont des dons et des qualités à offrir à la
communauté chrétienne ont exprimé les Pères synodaux: sommes-nous
en mesure de les accueillir en leur garantissant un espace de
fraternité dans nos communautés? Que peuvent-ils apporter à la
communauté chrétienne ?
TEXTE DE REFERENCE : N° 55 –
Attitude à adopter vis-à-vis de l‘homosexualité Dans certaines
familles, des personnes ont une orientation homosexuelle. À cet
égard, nous nous sommes interrogés sur l’attention pastorale à
adopter face à ces situations, en nous ré-férant à l’enseignement
de l’Église : « Il n'y a aucun fondement pour assimiler ou
établir des analogies, même lointaines, entre les unions
homosexuelles et le dessein de Dieu sur le mariage et la famille ».
Néanmoins, les hommes et les femmes ayant des tendances
homosexuelles doivent être accueillis avec respect et délicatesse.
« À leur égard, on évitera toute marque de discrimination injuste
»
R/ En préalable, il me semble qu'il ne
faudrait pas passer d'une caricature à l'autre. S'il est heureux de
cesser de caractériser l'homosexualité comme une pathologie
psychiatrique, il est dangereux de la considérer comme une nature
déterminant des comportements et une forme de vie. Il est important
de ne cesser d'affirmer la grande liberté de chacun. Pour apprendre
cette liberté spirituelle, dans les âges de transition, il est peut
être utile que l’Église se donne plus les moyens de proposer un
accompagnement spirituel approprié, c'est à dire libérant et
apaisant, aux jeunes.
Au cours de son histoire, l’Église a
su innover des formes de vies fondées sur l'amour qui ont fait
scandale en leur temps, car elles contrevenaient au modèle
familial dominant de l'époque : célibat consacré,
communauté « homogenre » abstinente, et même le mariage
fondé sur le consentement mutuel des époux. Quels sont les critères
qui ont conduit l’Église non seulement à reconnaître, mais aussi
à encourager et encadrer spirituellement ces formes de vie ? Le
chemin de Foi possible et la fécondité spirituelle que
manifestaient certain(e)s dans ces voies. Il me semble que c'est avec
les mêmes critères qu'il faudrait s'interroger pour l'accueil des
personnes homosexuelles. Il n'y a pas de cadre unique dans lequel
peuvent s'épanouir des « personnalités à orientation
homosexuelle ». Le célibat abstinent peut être tout aussi
exigent et épanouissant pour un(e) homosexuel(le) que pour un(e)
hétérosexuel(le). Une relation de fidélité dans un couple se
distinguera évidemment des potentialités biologiques que peuvent
expérimenter un couple hétérosexuel. Mais un couple homosexuel
désirant un enfant vivra les mêmes épreuves qu'un couple
hétérosexuel stéril. L'adoption a été pratiquée par des
personnes stériles, soit par choix, soit de fait, sans que cela ne
pose problème jusqu'à récemment. Je n'ai jamais entendu dire que
les prêtres qui ont été amené à adopté un neveu suite au décès
de ses parents aient causé des troubles psychologiques majeur du
fait qu'il n'a pas apporté de référent féminin à l'enfant. Il
est aujourd'hui étonnant que cette inquiétude cristallise
l’opposition de certains à l'adoption par des couples homosexuels.
Le travail spirituel qui me semble
utile entre les personnes homosexuelles et l'Eglise porte sur la
question qui se pose par ailleurs à tous baptisés : comment
vis-tu ta foi ? Avec Dieu ? Avec les autres ? Des
spécificités évidentes, en difficultés propres comme en
fécondités particulières sont à identifier, et à accompagner de
la manière la plus ajustée, dans le discernement ecclésial.
QUESTION 8/8 Comment promouvoir un
enseignement à la paternité responsable à la lumière de
l’encyclique Humanae Vitae ? Les prescriptions du magistère sur
les méthodes naturelles de contraception sont-elles réalistes ?
TEXTE DE REFERENCE : N° 58 - Dans
ce domaine aussi, il faut partir de l’écoute des personnes et
donner raison de la beauté et de la vérité d’une ouverture
inconditionnelle à la vie comme ce dont l’amour humain a besoin
pour être vécu en plénitude. C’est sur cette base que peut
reposer un enseignement approprié quant aux méthodes naturelles de
procréation responsable. Il s’agit d’aider à vivre d’une
manière harmonieuse et consciente la communion entre les époux,
sous toutes ses dimensions, y compris la responsabilité d’engendrer.
Il faut redécouvrir le message de l’Encyclique Humanae Vitae de
Paul VI, qui souligne le besoin de respecter la dignité de la
personne dans l’évaluation morale des méthodes de régulation des
naissances. L’adoption d’enfants, orphelins et abandonnés,
accueillis comme ses propres enfants, est une forme spécifique
d’apostolat familial (cf. Apostolicam Actuositatem, 11), plusieurs
fois rappelée et encouragée par le magistère (cf. Familiaris
Consortio, 41 ; Evangelium Vitae, 93). Le choix de l’adoption et de
se voir confier un enfant exprime une fécondité particulière de
l’expérience conjugale, et non seulement quand celle-ci est
marquée par la stérilité. Ce choix est un signe éloquent de
l’amour familial, une occasion de témoigner de sa foi et de rendre
leur dignité filiale à ceux qui en ont été privés.
En préalable, j'interrogerais la
pertinence (voire la sincérité) logique de la promotion de la
méthode dite du calendrier pour convenir à « une ouverture
inconditionnelle à la vie ». Si un couple décide des moments
des relations sexuelles en référence à la non-fertilité de la
femme, en quoi ce couple est-il plus « ouvert à la vie »
qu'un couple qui rend l'un ou l'autre de ses partenaires stériles
par des moyens chimiques, ou bien qui empêche la rencontre des
gamètes par des moyens mécaniques ?
Les intentions ne sont-elles pas les
mêmes ?
A fortiori, la parentalité responsable
suppose aussi de se soucier de la dignité matérielle,
intellectuelle et spirituelle des enfants à venir.
Cela supposerait-il que l'abstinence
deviendrait la seule solution passé un certain nombre d'enfant ?
Un discours spécifique sur la dimension spirituelle de l'acte
sexuel, en dehors de la potentialité de la conception, est
nécessaire. Il s'agit d'un moyen (parmi d'autre) de communiquer son
amour dans un couple. Il y aurait à convertir le « devoir
conjugal ». Rendre d'abord impossible, et même scandaleux,
l'invocation de ce devoir pour justifier les violences conjugales.
Peut être ré-habiter la notion d'obéissance entre époux, à la
lumière de la spiritualité vécue et travaillée par les religieux,
autour de l'écoute jusqu'au bout, mais sans abandon par aucun des
époux de sa liberté.
L'enjeu des moyens de contraception et
de choix d'accueillir un enfant doit donc absolument être
indissociable d'un dialogue respectueux et confiant sur la sexualité,
envisagée aussi et autant comme un des lieux de la respiration
spirituelle du couple. Ce dialogue gagnerait à avoir des lieux de
médiation, et/ou d'ouverture avec tiers (groupe de partage,
accompagnement spirituel de couple, etc.). Ce qui se pratique déjà,
et qui est donc à encourager.